lundi 1 mars 2010

Première partie - Levi Strauss and co et les débuts du jean au XXème siècle

Il est possible de dire que le succès du jean denim vient à l'origine, du fait qu'il représente un véritable progrès dans la tenue vestimentaire. Une création que l'on peut qualifier d'assez hasardeuse au départ, un tissu nouveau, des accessoires le rendant fonctionnel, une structure nouvelle et solide, ce pantalon va faire dans un premier temps, l'unanimité chez les travailleurs des États-Unis.

A. Les rivets de Jacob Davis à l'origine de la création d’un nouveau pantalon.

Jacob Davis a récemment quitté Riga pour émigrer aux Etats-Unis et tenter sa chance dans le Nouveau Monde. En 1868, il s’installe comme tailleurs dans une boutique de Reno, dans le Nevada. C’est en essayant de répondre aux besoins d’une cliente recherchant un vêtement de travail solide pour son mari bûcheron qu’il trouve une première idée de fabrication de la future paire de jean. Davis choisit de se faire approvisionner d’un épais coutil provenant de chez Levi Strauss, marchand de tissus établi à San Francisco et se met aussitôt à l’ouvrage. Lors du montage du pantalon, il aperçoit le paquet de rivets ( ci-contre, une photo d’exemples de rivets utilisés pour les jeans) qu’il utilise pour sangler de cuir les couvertures qu’il vend chez le maréchal-ferrant local et que les hommes attachent ensuite sur leur selle. C’est alors qu’il a l’idée de consolider les poches de ce vêtement avec ces rivets dans l’espoir que cela l’aidera à supporter les traitements que le bucheron lui fera subir. Une fois réalisé, Jacob Davis vend le pantalon, pour trois dollars, sans y repenser. En un mois à peine, ce sont des dizaines de pantalons rivetés qui sont vendus, en raison de la qualité de ce nouveau produit improvisé. Voyant la demande qui s’alimente dans un premier temps par le « bouche à oreille » augmenter constamment, Davis commence à penser qu’il tient une bonne idée qu’il ne souhaite perdre de vue au profit de la concurrence. Effectivement ces pantalons rivetés représente un véritable progrès ce qui peut forcément devenir une source de revenus potentiels.

B. Jacob Davis et Levi Strauss, une collaboration prometteuse.

Jacob Davis veut protéger son invention, cependant il demeure un petit tailleur et les 68 dollars nécessaires s’avèrent difficiles à réunir pour la demande de dépôt de brevet. Il décide alors de partager le risque en cherchant un partenaire. Né en Bavière en 1829, Loeb Strauss rejoint ses frères Louis et Jonas à New York en 1847, et anglicise son prénom pour Levi. Trois ans plus tard, il s’installe à San Francisco et fonde Levi Strauss & Co, qui doit développer l’affaire familiale sur la côte Ouest. Bien que le nom de sa société puisse suggerer qu'il s'agit d'une grande enseigne, les débuts de Levi sont ceux d’un simple représentant de commerce. Au tout début, il se contente de revendre des tissus, et quelques vêtements fabriqués par d’autres entreprises. Il ne se lancera dans la production qu’après sa rencontre avec Davis. Le 5 Juillet 1872, Jacob Davis écrit à Levi Strauss, son fournisseur de tissus, pour lui proposer la moitié de l’affaire à condition qu’il se charge du dépôt de brevet. Le 20 Mai 1873, les deux hommes reçoivent le brevet n°139,121 de l'US Trademark Office pour « une nouvelle façon de monter les poches ». Depuis les années 1860 Levi Strauss & Co (ci-contre) est une affaire prospère ce qui favorise le développement du nouveau pantalon, le jean.

C. Le succès du jean agrandi par une nouvelle matière, le Denim.

Les pantalons de Strauss ont du succès auprès des prospecteurs d'or car ils sont très résistants, toutefois, ils ne sont pas vraiment confortables à porter. Alors, plus tard, Levi Strauss adopte la toile de Nîmes, le nom de celle ci subira une déformation qui donnera ensuite l'expression anglicisée « Denim ». On qualifie ce produit de tissu de coton à armure de serge (ce qui désigne le modèle d'entrecroisement des fils) dont le tissage est très serré, ce qui laisse entendre qu'il est plutôt solide et donc parfait pour l'usage qu'en feraient les clients. La couleur bleue quant à elle provient d'une teinture appelée bleu de gêne. Ce bleu, initialement naturel, s'obtient grâce à deux plantes l'indigotier et le pastel des teinturiers (aussi appelé la guède, très cultivée autrefois en France, dans la région des Midi-Pyrénées, pour la production d'une teinture bleue, le pastel).(A compter de l'entre-deux guerres, ce bleu sera majoritairement obtenu avec des teintures synthétiques.) Aux yeux des adeptes, l'intérêt du Denim provient de ses capacités d'évolution, de l'usure qui lui donne un aspect vieilli. L'indigo naturel à la surface du fil se décolore avec le port et les lavages. Parallèlement le tissu s'assouplit. Avec cette nouvelle matière, une nouvelle légende est en marche, celle du 501.

D. La création du 501, marque d'évolution dans la conception des jeans.

Avant que l'appellation « jean » ne s'impose, le produit est désigné par le terme « Waist overalls » (des salopettes basses) par opposition aux « Bib overalls » (les salopettes). Levi Strauss & Co dépose le célébrissime 501 en 1890. Ce jean se révèle encore aujourd'hui être un pillier des modèles de jean. Il tient son nom du numéro de référence figurant sur les lots de tissu avec lequel il est fabriqué. Il est considéré comme « Waist overalls, 2 hip pockets » c’est-à-dire un bleu de travail comprenant deux poches « revolver » ainsi que des surpiqûres en fil de lin orange assorties aux rivets. Tout ceci ajouté au fait qu'il est conçu dans la nouvelle toile utilisée pas la marque, le denim, le 501 devient le produits majeur de la vente de Levi Strauss & Co. Dans un premier temps, les jeans Levi's portent au niveau de la ceinture une étiquette en lin représentant deux chevaux attachés à une parie de Levi's, chacun tirant dans une direction opposé. Ce procédé vise à montrer à quel point le produit est solide, c'est en quelque sorte un gage de qualité et d'authenticité. Puis, dans les années 1920, le jean Levi's 501 porte l’inscription « This is a pair of Them », le « them » se référant bien évidemment au Denim de qualité. Par la suite, le Levi's évolue et se voit agrémenté de passants à ceinture (les hommes de l’époque préférant porter le pantalon avec une ceinture qu’avec des bretelles), et enfin dans les années 50, il comportera une fermeture éclair (contrairement au modèle originel qui comprend une braguette à boutons). En clair, grâce de nombreuses innovations, le 501 devient rapidement le vêtement de travail par excellence de l'ouest américain.

Ce qui garantit également le succès de la collaboration entre Davis et Levi Stauss, c'est, outre le choix du Denim et le renforcement par des rivets, le fait d'avoir privilégié le pantalon, et non comme la concurrence, la salopette. Le jean denim devient le pantalon emblématique des ouvriers, mineurs et autres travailleurs manuels ainsi que les cow boys. Néanmoins, le brevet de Jacbo Davis et Levi Strauss doit expirer 20 ans après la date de dépôt. Très vite, l'entreprise Levi Strauss & Co ne sera plus la seule à détenir le monopole de la vente de jeans car des douzaines de fabricants de vêtements vont commencer à l'imiter et c'est alors que ce pantalon va devenir un tout nouveau symbole.
Par Gloria Coet